Souad Labbize

Enjamber la flaque oú se refleète l'enfer

Ce livre n'a rien à voir avec un témoignage pourtant, dès qu'on l'ouvre, nul doute, il s'agit bien de littérature. Le rythme, les images, la poésie, donnent encore plus de force au récit, et les phrases de Labbize rendent si bien le regard et la position de l'enfant au moment des faits. Une enfant pour qui il était difficile de comprendre ce qui s'était déroulé et la réaction des adultes. Pour qui, il était encore plus dur peut-être d'identifier ce qui était grave, de savoir sur quoi et sur qui reposait réellement la faute. Du point de vue de l'enfant, les mots mêmes étaient source de désarroi, l'exemple le plus évocateur est celui du terme "violée" que la mère utilise pour désigner ce qu'a failli (seulement failli croit-elle) subir sa fille. En entendant ce mot, l'enfant avait compris la couleur "Violet". Lorsque Hajar Bali revient sur ce point dans l'interview, Labbize lui dit que 40 ans après, il lui est encore pénible de l'écrire ce mot. C'est à force de "détails" comme celui-ci, que nous parvenons à saisir l'ampleur des séquelles et la gravité, réelle, des événements, de la situation. 

A partir de son histoire, Souad Labbize interroge toute la société qui est incapable de voir en face la souffrance et le danger encouru par les enfants et les femmes. Elle décrit en effet très bien le silence de la famille, de l'entourage, face aux viols. Pire encore, ce qu'elle montre c’est l'absence de ménagement des victimes, des personnes vulnérables, qui ne peuvent que se taire, que culpabiliser et ravaler leur détresse, l'enfuir profondément, sans jamais évidemment l'oublier. Maya Ouabadi

Klappentext:

"Rien de grave n'est arrivé depuis que ma mère a hurlé. Mon récit balbutiant a buté contre l'écho de sa voix. Mes paroles se sont recroquevillées autour de leur noyau, d'autres moins souples ont implosé, semant un arbre à grenades dans les plis de la gorge. Chaque floraison renforce les racines du grenadier tenace, les fruits non cueillis se rabougrissent, encombrent ma poitrine. Quels mots d'enfant allaient relater ce que je venais de subir? Je suis rarement revenue, depuis l'été soixante-quatorze, vers ces paroles enfermées dans mon cachot intime, le plus éloigné de ma vue quand je descends dans les caves de l'enfance."

Des décennies plus tard, Souad Labbize trouve enfin les mots pour dire, au-delà de l'effroi et de la douleur du viol, la violence du déni. En rompant le silence, elle ouvre la faille profonde oú s'est abîmée l'enfance.

Souad Labbize est descendue "dans les caves de l'enfance", pour écrire ce témoignage en soutien à toutes les femmes et filles victimes d'agressions sexuelles. Rédigé en français, traduit en arabe, il pose dans ces deux langues des mots sur la douleur et la honte, sur la rudesse de la mère et l'indolence du père. Des cris horrifiés, sans compassion ni tendresse pour l'enfant violée, la projettent sur le chemin au bout duquel elle gagnera sa liberté et son indépendance.

Über die Autorin / über den Autor:

Avant de s'établir à Toulouse, Souad Labbize a vécu à Alger et à tunis. Elle est romancière, poétesse et traductrice littéraire. Souad Labbize a publié un roman, J'aurais voulu être un escargot (Séguier, ré-édition Ed. des Lisières) et deux recueils de poésie, Une échelle de poche pour atteindre le ciel (Al Manar) et Brouillons amoureux (Ed. des Lisières).

Preis: CHF 13.00
Sprache: Französisch, Arabisch
Art: Broschiertes Buch
Erschienen: 2019
Verlag: Éditions ix
ISBN: 9791090062498
Masse: 100 S.

zurück